Canine academy – notre avis d’éducateur canin

Entre excitation et scandale, pétitions et espoirs, l’arrivée de la série “Canine Academy” (Canine Intervention) a fait beaucoup de bruit dans le monde du chien. Dans certains milieux, c’était l’espoir de faire mieux, d’aider les propriétaires avec une éducation plus moderne. Dans d’autres, c’était une honte qui allait jeter un nouveau “Cesar Millan” sous les projecteurs. Alors on a pris notre pop corn, lancé Netflix et avalé la saison 1 pour se faire une idée.

Canine Academy ne nous a pas plu (quelle surprise). Si elle n’égale heureusement pas celle de Cesar Milan en terme de violence, on y retrouve les punitions banalisées. On y parle de respect du langage canin pour l’ignorer ensuite. Un œil novice ne remarquerait sans doute pas les incohérences, et se satisferait du dialogue pseudo-positif. Beaucoup de friandises certes, mais des coups de laisse constants. Les chiens sont presque tous pourvus d’un discret collier étrangleur. Le “dominant dog collar”, un lacet très fin conçu pour couper l’arrivée d’air et maîtriser plus facilement le chien. On y retrouve évidemment des idées dépassées, comme celle du chef de meute. Bref, un concept bien rodé pour une série grand public.

A quoi on s’attendait en regardant Canine Academy

Comme pas mal d’éducateurs, nous nous attendions à un show télévisé à la Césan Millan. Celui qui tient plus à du domptage de bête féroce qu’à l’éducation d’un animal domestique. Beaucoup de violence déguisée en éducation, des cas pris à la va-vite, montés rapidement pour en faire des épisodes sensationnels. Un pit-bull qui attaque, un berger allemand qui aboie après un gosse, des de promesses d’euthanasie. 

Au vu de la bande annonce et du fort accent « obéissance », on pensait voir des folies. Rééduquer un chien mordeur avec des “assis” et des “au pied”, pas mal de coups de laisse et une plâtrée de théories fumeuses. 

On imaginait vraiment un show télévisé qui ferait du clic, très peu axé sur le chien et plus sur l’homme, le gourou, le “dominant” avec son aura de super-alpha-viril

Finalement, ce n’est pas aussi horrible qu’on l’imaginait. Beaucoup de bêtises, pas mal de violences déguisées, mais pas de coups de pieds et de poings. Tristement, c’est une avancée.

Les points positifs qu’amènent Canine Academy (et que vous devriez copier !)

Afin de ne pas simplement publier un article crachant sur cette série déjà bien attaquée, on a essayé de tirer quelques avantages à son visionnage. Ainsi, dès le début, Jay Leverette (l’éducateur) marque son intérêt pour le jeu. Chaque petit passage d’éducation est terminé par un jeu de balle ou de tug. L’ordre libérateur “break” est énormément utilisé, ce qui change agréablement des heures d’éducation sans pause. Les friandises sont utilisées à chaque fois, et en grande quantité. Tristement, elles sont couplées à des punitions (coups de collier) mais le scénario implique que c’est l’usage des renforçateurs qui permet d’améliorer le comportement, pas celle des coups de laisse. Peut-on y voir les prémices de l’éducation positive pour le grand public ?

Dans l’épisode 2, le chien “Diesel” tire en laisse et saute partout. La rééducation consistera à lui donner des friandises tout en tenant la laisse très courte. Une approche discutable, aux résultats mitigés en vérité. Mais un simulacre de protocole déjà bien plus respectueux que de mettre un torquatus et de pendre le chien (ce qu’on a vu chez Cesar Millan). 

On mentionne souvent le langage corporel du chien et le respect de celui-ci. Dans l’épisode 1, on y découvre une chienne apeurée, réactive aux humains. Lorsque l’ami du propriétaire va la saluer en se penchant sur elle, il est arrêté par Jay, qui lui explique le problème dans son comportement, et lui propose plutôt d’inciter la chienne à venir sur lui. 

Dommage, cette belle idée est ternie par l’utilisation d’un faux bras pour caresser la chienne de force, et l’invitation un poil obligatoire d’aller saluer l’invité en montant sur ses genoux. 

Il y a de beaux principes mais la pratique est incohérente. On espère que ces petits bouts d’idées tendant vers la bienveillance s’amplifient d’années en années.

Jay Leverette est-il le nouvel espoir de l’éducation moderne ?

Non, faut pas déconner (vous avez eu peur hein). Si Canine Academy offre des améliorations par rapport aux précédents essais sur l’éducation, elle ne révolutionne rien. Jay reste un éducateur autodidacte (comprenez, pas formé), axé sur l’obéissance et les sports de mordant, qui éduque avec des colliers coercitifs (étrangleurs, à piques ou électriques). On ne verra heureusement pas cette facette dans la série, ce qui évitera d’en faire la promotion. Mais trop de choses ridicules restent en suspens. En outre, il faut avouer qu’on a bien ri (jaune) quand on a découvert sur son site un kit d’éducation à presque 200$ comprenant une laisse, une longe, deux jouets et deux plateformes en bois. 

Ce qu’on a aimé de la série

Il est aisé de cracher sur le show en le comparant à ses prédécesseurs. C’est vrai qu’on aurait aimé se défouler devant tant de bêtise… Mais si on peut être positif pour les chiens, essayons de globaliser notre démarche de bienveillance envers les autres.

On déplore l’existence d’outils coercitifs, mais on souligne le fait qu’ils n’aient jamais été conseillés. Très centré sur le côté humain, le show développe la perte de confiance des propriétaires, l’historique du chien et enfin, le soulagement d’avoir des clés pour le guider. C’est d’ailleurs une portion qui occupe plus de temps d’écran que la véritable “rééducation” du chien. C’est un point très souvent oublié, et qui est mis en avant (avec un peu plus de variété que des caucasiens, et offre enfin un peu de diversité). 

En prenant du recul, ce qu’un amateur apprendrait de cette série, c’est d’utiliser beaucoup de friandises, tenir la laisse plus court, faire monter son chien sur des plateformes et enchainer assis, couché, reviens et pas bouger. 

Et non pas de jouer au cowboy en pendant son chien en bout de laisse, ou la technique du coup de pied latéral, fier héritage de Millan. 

Pour conclure : ne regardez pas Canine Academy

Et bien oui, comme on l’attendait, cette série n’est pas un cadeau. Elle résume les problèmes de comportement à des problèmes d’éducation qu’une plateforme en bois parvient à régler en une semaine. C’est une série de plus parmi plein d’autres, qui ressasse les mêmes bêtises de hiérarchie. Le seul avantage que j’y vois, c’est l’introduction de friandises.

Elle n’apporte rien, et continue dans la lancée de notre éducation traditionnelle française, des friandises, du jeu et des coups de laisse. C’était bien la peine de tourner 8 épisodes pour ressasser la même chose !

Tout ce qu’on peut faire à notre niveau, c’est continuer, encore et encore, de promouvoir l’éducation positive. Il ne faut pas tarir nos efforts et peut-être qu’un jour, elle deviendra vraiment une norme, et pas sa caricature. Ce jour-là, une série comme “Canine Academy” sera tuée dans l’œuf, arrêtée au seuil d’une pétition signée massivement.

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