Les chiens sont-ils vraiment plus heureux en vivant en maison ?

Museaux fouilleurs, queues frétillantes, quand nous voyons ces quadrupèdes avaler les mètres à grandes foulées, langue au-dehors…  Difficile de ne pas se sentir coupable à l’idée d’enfermer de si joyeux lurons dans un appartement, surtout s’il est petit. Exception faite des chihuahuas, où 50 m2 rime avec palace !

C’est, de prime abord, ce que nous pourrions penser, d’autant plus que le sujet a le mérite de mettre d’accord les éleveurs et les associations. « Pas de grand chien en appartement. » Pas d’appartement non plus pour les moyens et petits considérés comme « hyperactifs ». Bref, pour vivre en appartement, un chien doit être obligatoirement minuscule.

Alors, est-ce que l’espace compte vraiment ?

La réponse est non : les chiens peuvent vivre en maison, en appartement, en studio, au premier comme au dixième étage. À condition de répondre à ses besoins (sociaux, physiques et mentaux), que vous soyez actif ou plutôt roi du canapé, rien ne vous interdit d’avoir un chien en appartement.

 

 

 « Un appartement, c’est trop petit pour qu’un chien soit heureux »

S’il est vrai qu’un chien fait plus vite le tour d’un appartement qu’une maison avec jardin, songez que la demeure de l’humain est surtout considérée comme un nid. Un endroit où se reposer, manger, faire des jeux d’intérieur. Pas faire une randonnée ! Parcourez-vous votre chambre désespérément à la recherche d’un quelconque amusement ? La taille du foyer ne compte guère, nous sommes bien nombreux à travailler à notre bureau, le chien aux pieds, puis aller aux toilettes, suivi par ce dernier… Qui a clairement plus envie de passer du temps avec nous que faire le tour de sa propriété !

Nombreux sont les propriétaires de chiens vivant en maison avec jardin qui relèvent ce fait : leur compagnon ne va jamais bien longtemps dans le jardin seul mais préfère être avec leur humain… La compagnie du maître a infiniment plus de valeur que le même carré d’herbe à renifler chaque jour.

En fait, un espace trop “grand” pourrait même se convertir en un inconvénient, tandis qu’un espace “petit” peut être un avantage.

Certaines activités ne réclament pas de grands espaces, de fait, elles exigent tout le contraire ! C’est ainsi que l’on rassure un chiot en s’aidant d’un petit recoin particulier aménagé pour lui. Dès qu’un bruit anormal se produit, vous verrez l’animal s’y carapater en vitesse, aussi bien que lorsqu’il veut dormir et ce naturellement. Pensez à tous ces charmantes vidéos sur Internet où un labrador dormait, chiot, engoncé sous une étagère et que, grand adolescent, il essaye encore de s’y glisser. Moins d’espace signifie moins de lieu à contrôler avec la vue, l’oreille ou la truffe. Si quelque chose d’inquiétant se produit, Toutou voit bien que le danger ne franchit pas son périmètre et il finit donc par l’exclure.

D’ailleurs, on attrape souvent les abandonnés méfiants en nous servant de leur abri aménagé. S’il est bien nourri par une bonne âme, ledit animal abandonnera vite sa vie de bohème pour se cantonner à un espace réduit. Plus que l’espace, c’est la gestion du temps qui compte !

Nos animaux domestiques ont d’ailleurs conservé cette habitude, puisqu’ils peuvent dormir plus de 10 h par jour, sans compter la nuit complète. Même le plus actif des Jack Ressels suffisamment équilibré, bien dépensé se roulera avec plaisir dans son panier, sous les couvertures ou dans les bras de son maître pour de longues heures de sieste.

Chez les chiens, l’excitation est rare, le calme est valorisé.

Les jeux, les courses folles représentent des pics, lesquels peuvent monter très hauts, certes, mais demeurent ponctuels, s’étalent au long de la journée. Puis, l’excitation retombe, toutou saute sur le canapé et retourne à son dodo réparateur en attendant la prochaine activité. Un chien n’a pas besoin et ne doit pas être constamment stimulé. Entre eux, d’ailleurs, ce comportement frénétique peut être puni d’un grognement de la part des ainés, car chaque chose en son temps chez le chien, même lors des fameuses sorties !

Il y a le jeu, le repos, le repas puis le repos et ainsi de suite.  Observez un groupe (équilibré) dans un parc, passent-ils toute l’heure à se courir après ou se couchent-ils au sol pour reprendre haleine, échanger des câlins et des reniflements ? Parfois ils semblent simplement s’observer, ce qui a le don d’énerver leur maître « c’est pour ça que je t’ai sorti ? », alors que cette distribution activité/retour au calme est naturelle chez leur compagnon.

 

 

Comment « grand espace » peut-il rimer avec « prison » ?

 

Comme nous l’avons vu, un petit espace bien géré, pilier d’activités savamment distribuées n’est pas un problème. Et si la taille réduite n’est pas un problème, la grande taille, en revanche peut le devenir.

En apparence, la maison est une option merveilleuse qui permettrait à l’animal d’être plus libre de ses mouvements, surtout s’il y a un jardin ! Se rouler dans l’herbe fraîche, observer le soleil se coucher, profiter du vent dans le pelage, saisir les odeurs de Kiki le voisin qui a fait pipi sur le portail, recommencer le lendemain, et encore, puis encore… Et là est le souci. Au final Toutou connaît le jardin de la même manière qu’il finit par connaître les meubles de l’appartement au point de s’en désintéresser (ce qui est une très bonne chose d’ailleurs après une période chiot-rambo-combat-les-méchantes-pattes-de-chaise).

Imaginez que vous partez deux semaines dans un luxueux hôtel avec une chambre de 100 m², vous ne voudriez pas quitter cette merveille pendant 24 h avant de mettre le nez dehors. Difficile de résister aux odeurs de Paella du restaurant à Barcelone, des bruits de fête à Magaluz ou aux enseignes des grandes Galeries à Paris. Si on vous laissait enfermé, ne seriez-vous pas frustré ?

Enfin, rappelez-vous que si être assigné à résidence est un châtiment auxquels sont condamnés certains prisonniers (souvent des riches cantonnés à leur villa) ce n’est pas pour rien. Que les barreaux soient de fer ou d’or, situés à 100 m de la maison ou 1 000 mètres, ils sont la frontière entre votre ennuyeuse chambre et l’extérieur si attrayant.

 

Les chiens « d’appartement » ont un rythme de vie généralement plus sain

Il est vrai, les maîtres vivant en maison sont parfois victime d’une crise de flemmardise aiguë : pluie, vent ou verglas, le prétexte est facile pour ouvrir la porte du jardin plutôt que de prendre la laisse. Ils sortent moins voire plus du tout leur chien, lequel finit par paître tel une chèvre dans leur joli jardin. L’animal ne court plus – vous le feriez tout seul et sans raison vous ? – et se dépense donc moins que celui qui vit dans son petit appartement et doit être sorti plusieurs fois par jour.

Peu à peu, les chiens vivant en maison tombent dans l’apathie, faute d’occupations physiques, mentales et sociales, ou développent des troubles comportementaux. Pensez aux Médors qui hurlent derrière leurs portails, crocs dégoulinant de bave, ou encore à ce Berger Allemand qui enchaîne les ronds avec vue sur l’immense maison qui s’étend derrière lui.

D’ailleurs, si vous lui ouvrez, cette maison, il y a une bonne chance qu’il file se coucher dans son panier voir près de son humain, malgré l’inconfort du sol. Le chien étant un animal sociable, il favorise généralement l’endroit le plus proche de son maître au point de dédaigner la jolie terrasse ouverte sur un soleil radieux.

En vivant en appartement, le chien doit être sorti au minimum trois fois par jour, fait donc plus de rencontres, explore plus de terrain, et sera naturellement, plus habitué à marcher sagement en laisse, à avoir un bon rappel et à tolérer les situations et bruits incongrus. Ses besoins sont respectés :

  • physiques parce qu’il est souvent lâché, ou marche pendant les balades en laisse
  • mentaux avec toutes les odeurs à renifler, et l’éducation à maintenir (ne pas tirer, assis, au pied…)
  • sociaux en rencontrant plein d’amis à deux et quatre pattes

 

Pourvu qu’il soit nourri, aimé et sorti, le cliché du chien malheureux en appartement n’a tout simplement aucun sens.

 

L’appartement, c’est aussi pour les chiens actifs !

Tout ce qui a été dit plus haut est vendeur, mais est-ce applicable à toutes les races ? Vous imaginez-vous un chien-loup de Saarlos dans un appartement ? Difficile à faire, alors tapez sur Google et vous verrez que certains Parisiens vivent avec ces grands animaux dans de petits appartements. Bien sûr, ils doivent sacrifier de longues heures de balade, pratiquer des activités renforçatrices, fournir plus d’efforts qu’avec des chiens plus tranquilles de nature, mais finalement, ces chiens s’adaptent et sont heureux.

C’est ainsi que l’on voit de plus en plus d’animaux autrefois destinés à des activités très sportives envahir nos murs, comme les Springers, les Salukis, ou encore les Borders Collies. Ces chiens n’appartiennent pas qu’à des propriétaires ayant la chance de posséder une grande et belle villa dans laquelle s’épanouir. Serait-ce parce que finalement, quand le chien a bien été choisi et que ses besoins correspondent aux désirs son propriétaire, peu d’incidents sont à déplorer ? En effet, un Berger Belge équilibré, bien occupé fera un magnifique tapis pour votre salon tandis qu’un chihuahua frustré de ne sortir qu’en sac ou dans le jardin enrichira votre médecin ORL et les fabricants de prothèses auditives.

Car de la même manière que les Saint Bernard sont victimes de croyances liées à l’espace, les Yorkshires souffrent d’être considéré comme de piètres marcheurs. Eux aussi ont besoin de renifler, sentir la terre sous leurs pattes, faire travailler truffe et cerveau.

Hors maladie (hyperactivité, trouble comportemental à détecter auprès de professionnels), la taille du chien ou de la demeure ne sont pas une fatalité. L’appartement, la maison ne sont que des paniers, plus ou moins gigantesques que le chien considère comme un endroit de repos. Du moment qu’il en sort régulièrement, il n’y a pas de problème ! 

 

 

La vraie question qui se pose, qu’importe l’habitation

S’il est plus facile de compter les m² pour juger hâtivement de l’acceptation du chien ou non, la vraie question, le vrai débat reste caché sous les couches de préoccupations inutiles. Soyons honnêtes, les chiens n’ont rien à faire de la taille de votre foyer. Que son espace fasse 50m² ou 250m², la plupart de son temps sera passé à somnoler près de vous ou à tantôt vous observer, tantôt espionner le voisinage à travers les fenêtres. Ce qui compte, c’est le nombre et la qualité de ses sorties et interactions avec vous. C’est ainsi que sa qualité de vie doit être appréciée, pas en m². 

C’est la véritable préoccupation qui devrait occuper nos méninges. Nos sorties ponctuelles sont-elles assez riches ? Médor est-il à l’aise dehors, épanoui, éduqué avec bienveillance ? Se dépense-t-il assez ? Son rythme tantôt actif, tantôt passif lui convient-il ? Faut-il augmenter l’un, réduire l’autre ? Sortir moins longtemps mais prendre plus de temps pour le laisser prendre les odeurs ?

Avec le souci de bien faire, on peut ajouter quelques jeux d’intérieur et enrichissements pour agrémenter le quotidien de nos amis (qui, rappelons-le, ne sont pas des machines à courir).

Et par-dessus l’espace disponible, par-dessus le rythme de leur quotidien…

C’est avant tout de notre présence dont ils sont besoin.

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